L’élève, le théâtre et la 3D

Le théâtre et la scénographie en perspective virtuelle

Voici un article passionnant, pas très récent, de Madame Françoise Gomez, chargée d’une mission d’inspection générale pour le théâtre. Cet article est paru dans la revue du CNDP (Centre national de documentation pédagogique) n°58 de juin 2007 dans le cadre de dossiers de l’ingénierie éducative et parmi d’autres articles sur le numérique et la pédagogie.
“A l’heure du numérique : quelle place donner à la représentation virtuelle dans l’art théâtral ? Réflexion d’un point de vue technique et didactique d’une scénographe amenée à faire intervenir la 3D dans les mises en scène qu’elle accompagne.”

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Depuis 2007 les choses ont-elles évolué? la 3D s’est-elle inscrite durablement dans l’enseignement théâtral et sur les scènes nationales?
Dans l’histoire du théâtre en général et dans l’histoire de la scénographie en particulier, les progrès technologiques ont toujours mis de nombreuses années avant de trouver leur place dans l’espace dramatique.

Patience…

théâtre praticable de théâtre

Architecte et scénographe

Architecte et scénographe, “Le temps de l’usage, l’usage du temps”.

Là où le scénographe créer des espaces éphémères qui se transforment au fur et à mesure que le jeu dramatique avance, l’architecte tente d’installer des espaces de vie pérenne en parfaite adéquation avec l’usage d’un temps historique présent.

L’architecte se retrouve donc confronter à créer des espaces qui devraient anticiper les évolutions rapides de nos sociétés comme le scénographe anticipe sur la transformation dramatique de son décor, à ceci prés que lui a lu la pièce alors que l’architecte ne lisant pas dans l’avenir ne peut qu’imaginer, interpréter, les signes avant-coureurs de nos envies de toujours plus de conforts et d’espaces.

Le scénographe à besoin de notion d’architectures pour donner toute la cohérence historique et technologique aux volumes qu’il implante sur la scène. Il a également besoin d’avoir des notions de mise en oeuvre des matériaux, d’acquérir quelques notions de Résistance Des Matériaux (RDM). Il pourrait acquérir également quelques compétences dans l’utilisation de logiciel de modélisation 3D.

L’architecte à besoin de notion de dramaturgie pour dialoguer efficacement avec le Metteur en scène.  Il doit enrichir sa culture générale de littérature, d’opéra, de cinéma, de peinture, de sculpture. Il doit accepter de mettre la main à la pâte lorsqu’il doit dessiner les motifs des toiles peintes ou réaliser les plan de construction. Il doit accepter de diminuer ses honoraires lorsqu’il travaille sur des productions modestes.

Il n’y a donc pas à choisir entre architecte et scénographe ou scénographe et architecte pour concevoir et réaliser des décors de théâtre. Les deux métiers sont complémentaires, même si l’architecte-scénographe n’a pas besoin de connaître toutes les contraintes qu’impose la construction d’édifices ou de maisons particulières. Ces contraintes au fil du temps ont quelque peu bridé la créativité des architectes. Il n’existe pas à priori pour l’instant de diplôme obligatoire pour exercer le métier de scénographe alors que le métier d’architecte est strictement encadré. Il serait dommageable pour la profession de scénographe d’arriver au niveau des contraintes que subissent les architectes.

Bibliographie :

  • “Neufert”  – Direction Jean Michel Hoyet  – Éditions du Moniteur :
  • “Architecture, scénographie et décor de théâtre” J. GAULME Edition : Magnard
  • “Architecture et dramaturgie”, Ouvrage collectif
Edition : Editions d’aujourd’hui
  • “Scénographie nouvelle” J. POLIERI Place JM (dispo à la Librairie des Éditions AS)
  • “L’architecture théâtrale” D. BASDEVANT Édition La Documentation Française 1966
  • “André Acquart architecte de l’éphémère” Jean Chollet Éditions actes sud

Accessoires de théâtre

Les accessoires de théâtre : un prolongement de l’acteur

 

Les accessoires de théâtre, qu’ils soient figuratifs, symbolistes ou formels, constituent les prolongements indispensable à l’acteur. Lorsqu’il monte sur scène, un objet utilisé par les acteurs doit être en représentation. Se contenter de le reproduire tel qu’il existe dans la “vraie vie” diminue paradoxalement sa vraisemblance. L’accessoire de théâtre est le prolongement naturel du travail du scénographe qui ne se contente pas de copier les espaces du réel. Ainsi, pour concevoir un accessoire de théâtre, je m’attache à lui créer une nouvelle vraisemblance qui s’appuie sur sa fonction, son usage, son style.

accessoires de théâtre la poussette pour le spectacle Trois Soeurs
Prenons l’exemple d’une chaise,  communément, sa fonction est celle de s’asseoir, elle est identifiée au premier coup d’oeil, une assise, 4 pieds, un dossier. Son usage(défini par le metteur en scène) est bien plus large on peut monter dessus, s’en servir comme arme ou comme de défense, on peut jongler avec, la casser, bloquer une porte, etc.. . Son style est la forme qu’on lui donnera, en raccord avec le décor proposé par le scénographe, ce style peut être : historique, fantastique, original, absurde, bancal…
On pourra distinguer deux grands types d’accessoires de théâtre. Les accessoires images et les accessoires fonction. En effet pour rester dans l’exemple de la chaise, si vous décidez de la réaliser entièrement en mousse et qu’elle tienne malgré tout debout avec une patine bois par dessus, vue de la salle vous voyez une chaise. Cette chaise peut être considérée comme un accessoire image, car elle ne remplie pas les fonctions d’un chaise normal car lorsque le comédien voudra s’en servir, elle s’écroulera sous son poids.
Une fois bien défini la fonction, l’usage, le style, l’image, le travail de l’accessoiriste devient plus simple et l’acteur peut s’approprier l’accessoire de théâtre ainsi fabriquer, sans risque de jouer tout seul.

Le scénographe du vide

Le scénographe du vide : une économie de l’avant garde?

“Je peux prendre n’importe quel espace vide et l’appeler une scène. Quelqu’un traverse cet espace vide pendant que quelqu’un d’autre l’observe, et c’est suffisant pour que l’acte théâtral soit amorcé”. C’est ainsi que Peter Brook défini le commencement de l’acte théâtral.

J’envisage mon travail de scénographe du vide comme une tentative d’apporter un sens au vide. Le vide peut vite s’encombrer de petits riens. La circulation y devient alors difficile et éprouvante. Le vide a horreur de la nature. Vous vous êtes sans doute arrêté devant une pièce où vous avez vécu et qui vient d’être vidé pour un déménagement. Le sentiment de vide fait vite place aux souvenirs qui affluent, le lit agité, le bureau crayonné, la moquette arpentée, les fantômes de la bibliothèque des posters et autres bibelots retiennent un instant l’attention. Vous venez de remplir mentalement l’espace vide et vous vous y sentez bien. Nul besoin d’objets visibles pour vous souvenirs de ces circulations : de votre bureau au lit, du lit à la bibliothèque, de la bibliothèque au bureau, la pendule d’argent… l’espace s’est rempli d’une vie, d’une enfance, d’une rencontre, d’un lieu de vie. Cette pièce deviendra peut être une cuisine, une salle de bain, une chambre pour enfants, une salle de jeux, qu’importe, le vide sera sera rempli par d’autre, mais vous, vous , ce vide-là sera toujours plein de vous….

Mon travail de scénographe du vide me permet d’apprécier en priorité les « qualités du vide ». Ce vide, je tente de le remplir le mieux possible lorsque l’on s’adresse à moi pour un travail bien précis où la construction des espaces se doit de simplement rendre visible leur usage. Représenter une cuisine, une chambre, un salon comme dans la vraie vie peut vite dériver vers un naturalisme qui n’apporte rien aux situations dramatiques.
Ici, mon travail plastique s’attache, au contraire, à construire l’espace comme le comédien monte sur scène pour incarner un personnage.

scénographe du vide pour une scène épurée

Ainsi, la cuisine penche, la chambre est à l’envers, les murs dégoulinent de sueurs et d’effroi. Grossières illustrations, double effet de situations dramatiques déjà chargées? Peut-être… mais il est de bon ton de nous faire croire qu’un espace dramatique épuré constitue l’avant-garde d’une nouvelle qualité du vide alors qu’il n’est plus la plupart du temps que la simple conséquence d’une économie chagrine. Car enfin si Peter Brook prend soin de préciser à la fin de sa phrase : “que l’acte théâtral soit amorcé” , c’est que , certes, le simple fait de traverser un espace vide devant un spectateur peut créer une courte situation dramatique, mais qu’elle risque d’ennuyer si cela dure une heure et demie.